Diffusion Sélective de l'Information
Du 14 au 23 Février 2022


 

Eau et changement climatique : Quelles stratégies d'adaptation pour la gestion de l'eau d'irrigation dans le sud-est tunisien

1. Introduction
Dans un contexte de raréfaction et des risques de changements climatiques, la gestion de la ressource en eau est devenue une préoccupation majeure du monde entier. Particulièrement concernée, la Tunisie se place dans la catégorie des pays les moins dotés en ressources en eau et parmi les pays les plus sévèrement touchées par les changements climatiques (MAE et GIZ, 2011 ; Nefzi, 2012 ; MEE, 2013) dans le bassin méditerranéen. Aujourd’hui l’ampleur des enjeux des changements climatiques sur l’agriculture sont inévitables et soulèvent la question de l’adaptation, qui constitue une urgence pour le secteur irrigué et notamment dans le sud-est Tunisien. Plusieurs études nationales et régionales soulignent les risques de baisse importante des ressources en eaux (-28% pour les ressources en eaux souterraines et -5% pour les eaux de surface), et de la dégradation de la qualité de l’eau d’irrigation (salinité plus élevée, particulièrement dans les zones côtières et le Sud tunisien) (MEDD/DGEQV, 2008 ; MAE et GIZ, 2011 ; MEE, 2013).
L’adaptation au changement climatique a reçu une attention accrue dans le débat scientifique et politique et est de plus en plus un sujet d’intérêt tant pour les producteurs que pour les décideurs (GIEC, 2001 ; Pierre et al., 2012). Elle est définie comme l’ensemble des mesures et ajustements mis en œuvre par des personnes, des organisations ou tout être vivant, qui permettent d’éviter ou bien de profiter des effets directs et indirects du changement climatique (Stéphane, 2011). Les méthodes d’adaptation communes dans l’agriculture comprennent la diversification des cultures, la gestion des terres et des eaux, la modification des dates de plantation, le changement des plans d’assolement, la diversification des variétés végétales, l’assurance des récoltes, la diversification des revenus, la migration, l’utilisation conjuguée des eaux de surface et souterraine, le développement de nouvelles sources d’eau (approfondissement des forage, achat et vente d’eau sur des marchés d’eau informels), vente des terres et reconversion vers l’agriculture pluviale (Smit et Skinner, 2002 ; Moench, 2007 ; Bryan et al., 2009; Molle et al., 2010; Mwinjaka et al., 2010; Jones et Boyd, 2011; Gebrehiwot et van der Veen, 2013; Wheeler et al., 2013; van Steenbergen et al., 2014 ; Alam, 2015; Bosco et al., 2016).
En zones arides, la rareté des ressources en eau souterraine aggravée par les risques des changements climatiques impacte à des degrés variables tous les systèmes de production agricole (Rosenzweig et al., 2004 ; Iglesias et Garrote, 2015 ; Lasram et al., 2015) et soulève la question d’adaptation (Faysse et al., 2011 ; Jeder et al., 2013 ; Grami et Ben Rejeb, 2015). L’adaptation à la rareté des ressources naturelles est essentielle, en particulier à la lumière du changement climatique, et peut être poursuivie sous la forme d’une adaptation privée ou publique (Frankhauser et al., 1999; Mendelsohn, 2000; Stern, 2006). La perception et l’adoption des stratégies d’adaptation étaient les deux composantes clés de l’adaptation en agriculture (Maddison, 2007) in Alam (2015) et Elum et al. (2017). Elles sont généralement liées. Selon Yegbemey et al. (2014), l’adaptation des producteurs, face à des stimuli tels que le changement climatique, n’est cohérent qu’au regard de leur conception et donc, de leur perception. Toutes perceptions faussées peuvent conduire à des comportements inappropriés en termes d’adaptation. Cela signifie que les agriculteurs doivent d’abord percevoir un changement dans les conditions climatiques et ensuite mettre en œuvre un ensemble de stratégies pour y remédier.
En agriculture, différentes formes de stratégies d’adaptation peuvent être classées, y compris anticipées (prévues), réactives (autonomes), gestion de la demande et de l’offre, structurelles et non structurelles, et rigides et douces (De perthuis et al., 2010 ; Stéphane, 2011 ; Alam, 2015). L’adaptation peut avoir lieu à la ferme et hors ferme. L’adaptation prévue nécessite une bonne prévision et, souvent, des incitations gouvernementales, alors que l’adaptation autonome se fait par des agents privés (Seo, 2011 ; Alam, 2015). L’adaptation réactive consiste à réagir ex post aux impacts adverses du changement climatique, lorsqu’ils se produisent. L’adaptation anticipative, au contraire, consiste à agir avant que les impacts ne se produisent pour réduire la vulnérabilité à ces impacts et en limiter les conséquences adverses ou en tirer des bénéfices nouveaux (De perthuis et al., 2010 ; Magnan, 2014). Néanmoins, la distinction entre ces deux formes reste non perceptible dans la réalité. En effet, en choisissant de s’adapter aux risques climatiques, le producteur ou l’irrigant adopte des stratégies aussi bien réactives qu’anticipatives. Dans ce processus de double réaction (perception et adaptation), le producteur ne perd pas sa nature d’agent économique. L’étude des pratiques agricoles et des objectifs des agriculteurs peut aider à comprendre ces stratégies dans le sud-est tunisien.
Dans le sud-est Tunisien, au fil des années, les sociétés locales ont développé la capacité de s’adapter aux changements environnementaux et à la variabilité du climat. L’agriculture irriguée en particulier est désormais fragilisée dans de nombreuses régions. Pourtant, cette catégorie d’exploitations est réputée résiliente : depuis toujours, elle a su composer avec les risques climatiques et économiques. En revanche, l’accroissement très prononcé de la variabilité spatiale et temporelle du climat, la faiblesse du dispositif institutionnel d’adaptation à la rareté des ressources en eaux souterraines et de l’ignorance de différentes stratégies d’adaptation privés au défi des changements climatiques posent aujourd’hui des questions cruciales en termes d’adaptabilité des systèmes de production irrigués et constituent des défis majeurs beaucoup plus difficiles à gérer (Jeder et al., 2013). L’impact de ces évènements sur l’agriculture irriguée est en effet multiforme (Frija et al., 2016 ; Mahdhi et al., 2016). Il pèse sur les ressources en eau souterraine (épuisement et salinité), sur les personnes, sur l’augmentation des besoins d’irrigation, sur le capital des exploitations et sur les résultats de ces dernières (systèmes d’élevage et de culture moins productifs), mais également sur les rapports sociaux au sein des sociétés, qui sont mis à mal, le tout contribuant à accroître la vulnérabilité en particulier des petites exploitations familiales, qui ont des capacités limités pour s’adapter. A l’échelle des périmètres irrigués privés, les irrigants se trouvent obligés à investir toujours pour continuer de disposer d’eau douce en quantité suffisante pour leurs cultures soit à modifier leurs systèmes de cultures aux niveaux des périmètres irrigués privés pour s’adapter à la pénurie des ressources en eau souterraine et éviter les effets de la variabilité du climat (Faysse et al., 2011 ; Frija et al., 2014 ). Face à ces évolutions, s’adapter aux effets du changement climatique sur les ressources en eau nécessitera à coté des ajustements techniques, politiques, institutionnels et comportementaux une bonne compréhension et analyse de différentes stratégies d’adaptation privés à la rareté des ressources en eau souterraine dans le sud-est Tunisienne, pris comme zone d’étude. A cette fin, l’objectif de cet étude est d’étudier les différentes types de stratégies adoptées par les agriculteurs pour faire face à une crise d’accès à l’eau souterraine et d’analyser la rentabilité économique des systèmes de production irrigués en relation avec les adaptations aux changements climatiques dans le sud-est Tunisienne.

2. Zone enquêtée
La zone enquêtée est la partie nord-ouest de la Jeffara tunisienne. Elle s’étend sur les deux gouvernorats de Médenine et de Tataouine. Elle s’inscrit dans un quadrilatère passant par Rmada, Ghomrassen, Médenine et Jorf. La superficie de cette zone est d’environ 117000 ha. Sur le plan climatique, cette zone se trouve dans l’aire isoclimatique méditerranéenne (à pluie hivernale et été sec). Son climat, aride à saharien, se caractérise par une pluviométrie faible (inférieure à 200 mm) irrégulière et sporadique (le coefficient de variation dépasse 50%) et par un bilan climatique déficitaire pour tous les mois de l’année (Genin et al., 2006). Les ressources en eau souterraine représentent le principal apport hydrique exploitable dans cette zone. Ces ressources subissent des fortes pressions qui ne cessent de s’accroître à la suite d’un accroissement démographique rapide et d’une extension remarquable du potentiel irrigable qui atteint 8241 ha en 2015 dont 5925 ha sont des périmètres irrigués privés (PIP), crées principalement autour des puits de surface et des forages (ODS, 2016).
L’agriculture irriguée constitue l’activité économique principale des régions de Smar, Bedoui, Amra, Magrawia, El Maouna et d’El Ferch (Figure 1). Elle est caractérisée par des exploitations de petite taille orientées essentiellement vers les cultures maraîchères de plein champ et de l’arboriculture avec prédominance de l’olivier (Khatoui, 2014 ; Mahdhi, 2016).
Une combinaison d’approches qualitatives (des interviews semi structurées de groupes informels et individuels, des observations participantes et des transects participatifs) et quantitatives, moyennant des enquêtes approfondies, ont été utilisées. Sept périmètres irrigués privés relavant aux deux Gouvernorats de Médenine (Zone 1) et de Tataouine (Zone 2) ont été enquêtées. La collecte de données a été faite grâce à un questionnaire portant sur 190 exploitants sélectionnés d’une manière aléatoire et proportionnel à l’effectif total des puits de surface par périmètres irrigués.
Les principales données collectées auprès des exploitants échantillonnés étaient relatives à leurs caractéristiques démographiques et socioéconomiques, aux stratégies développées par eux pour faire face aux conséquences des changements climatiques et aux prix et les quantités des inputs et outputs entrant dans la production de la campagne agricole 2014-2015. Le traitement et l’analyse statistique des données collectées ont été réalisés avec les logiciels Word, Excel et SPSS.

3. Stratégies d’adaptation diversifiées face à la pénurie d’eau
Cette section analyse les stratégies d’adaptations des irrigants à la pénurie des ressources en eau souterraine dans un contexte de changement climatique à travers la réponse à la question suivante : « quels ajustements avez-vous faits dans votre système de production agricole afin de vous adapter aux changements que vous avez observés ? ».
Les stratégies d’adaptation aux changements climatiques sont diverses. Quatre-vingt-cinq pour cent (85%) des irrigants enquêtés ayant perçu des changements climatiques et les problèmes de la rareté des ressources en eau souterraine, ont développé une gamme très variée de mesures d’adaptation (Figure 1).


Figure 1. Mesures et stratégies d'adaptation répertoriées

Les irrigants ne développant aucune stratégie d’adaptation ont mentionné, entre autres, le manque d’information sur les stratégies d’adaptation et l’absence de réserves financières comme principales barrières à l’adaptation. Ces résultats ont corroboré les observations faites par d’autres études en Afrique (Adger et al., 2005 ; Reidsma et al., 2010 ; Gebrehiwot et van der Veen, 2013; Alam, 2015; Yegbemey et al., 2014) qui révèlent que l’adaptation peut être limitée par de nombreux facteurs, tels que les obstacles socioéconomiques, institutionnels, biophysiques, psychologiques et financiers, et, par conséquent, l’adaptation privée ne peut pas être entièrement autonome.
En termes de stratégies d’adaptation, la Figure 1 illustre trois groupes de stratégie autonome et réactive. Une première catégorie dite d’offensif ou « de chasse d’eau ». Elle est conçue pour la gestion de l’offre en eau d’irrigation et accroitre la production. Elle comprend, principalement, l’approfondissement et le curage des nouveaux puits, la diversification des sources d’irrigation (branchement au réseau public d’irrigation) et l’augmentation de la superficie irriguée à travers la location des terres plus riche en eau. Elle est adoptée par 62% des irrigants. En moyenne ses actions sont considérées comme des mesures d’adaptations positives dans la mesure où elle améliore la capacité des irrigants à une telle variabilité climatique mais les problèmes de durabilité dans la conception et la mise en œuvre de ces mesures d’adaptation restent posés dans une zone marquée par la surexploitation des ressources en eau souterraine.
La deuxième catégorie est dite défensive ou d’adaptatif. Elle est conçue pour la gestion de la demande en eau d’irrigation à l’échelle de l’exploitation. Elle vise à adapter les systèmes de production à l’eau disponible sur l’exploitation compte-tenu des puits et forages existants. Elle comprend la diversification des cultures, les ajustements du calendrier agricole, le changement du système de culture et conservation de l’eau d’irrigation (économie de l’eau) à l’échelle de l’exploitation. Elle est adoptée par 83% des irrigants. En moyenne ses actions sont considérées comme des mesures d’adaptation positives et générales que les exploitations Tunisienne devront continuer d’adopter à l’avenir pour améliorer la capacité d’adaptation des irrigants à une telle variabilité climatique et maintenir la productivité du secteur irrigué à travers une amélioration de l’infrastructure de l’irrigation et de pratiques de gestion ainsi que le passage à des cultures qui valorise mieux l’eau d’irrigation.
Enfin, la troisième catégorie est dite contractive consistant à diminuer l’échelle de fonctionnement de l’exploitation par le recours à la diminution de la superficie irriguée et la reconversion vers l’agriculture pluviale. Elle est adoptée par 41% des irrigants. Ce type de stratégie est considéré comme négatif et met en péril la productivité et la durabilité des types d’exploitations qui entretiennent ses types d’actions à l’avenir.
Eu égard à la littérature, ces résultats ont corroboré les résultats d’autres études en Afrique du Nord (Berahmani et al., 2012; Grami et Ben Rejeb, 2015 ; Frija et al., 2016), en Asie et du Moyen-Orient (Molle et al., 2010; Venot et al., 2010; Ghazouani et al., 2014 ; Alam, 2015), en Europe (Iglesias et Garroteb, 2015) et en Australie (Wheeler et al., 2013).
Ces actions et stratégies individuelles montrent à la fois des points communs et des spécificités par rapport à d’autres stratégies d’adaptation avancées par d’autres travaux. Ces actions ont été identifiées au niveau des périmètres irrigués où les agriculteurs sont confrontés à une pénurie d’eau de surface (Molle et al., 2009). En Asie du Sud dans de nombreuses situations d’accès difficile aux ressources en eau souterraine, ces actions comprennent l’achat et vente d’eau sur des marchés d’eau informels (Mukherji et Shah, 2005). Dans quelques cas, ces stratégies d’adaptation peuvent être collectives comme le cas de la région de Souss, au Maroc où les agriculteurs ont collectivement converti leur système d’irrigation en irrigation localisée face à la baisse des débits des forages collectifs, et à la région de Nadhour (Nord de la Tunisie) ou le GDA «Groupement de Développement Agricole» arrêtent de donner de l’eau à des exploitations agricoles situées hors du périmètre et limitent au début de l’année les superficies irriguées par agriculteur pour diminuer les tensions sur le tour d’eau (Faysse et al., 2011). Néanmoins, la plupart de ses stratégies offensives ou défensives ne sont pas économiquement et écologiquement viables en même temps et leur durabilité reste cependant conditionnée par la qualité des intervenants du côté des usagers comme de l’administration.

4. Rentabilité économique des stratégies d’adaptation
Dans un contexte de raréfaction des ressources en eau souterraine aggravé par les risques de changements climatiques, l’adaptation apparaît comme une nécessité pour les irrigants dans le sud-est Tunisien. Cependant, il ne faudrait pas perdre de vue que l’effet ou le résultat attendu par les irrigants en adoptant la plus simple ou la plus complexe des possibles stratégies d’adaptation reste le maintien de son niveau de profit. Dans le meilleur des cas, une amélioration voire augmentation du dit niveau est le résultat escompté. Le Tableau 1 présente quelques éléments du compte d’exploitation des enquêtés.

Tableau1. Quelques éléments du compte de l'exploitation de l'irrigant selon le type d'adaptation (N=190)

D’une manière générale, comparativement aux irrigants n’adoptant aucune des stratégies précédemment identifiées, les irrigants adoptants enregistrent à l’hectare un produit brut moyen, une marge nette moyenne et un profit annuel moyen plus élevés. La tendance évolutive des éléments du compte d’exploitations est la même pour les stratégies défensives et contractives. Tous les groupes d’adaptation entrainent une augmentation du produit brut de la marge nette et du profit annuel du producteur. Par ailleurs, tous les types d’adaptation à l’exception de la stratégie offensive entrainent une réduction des coûts totaux de production (Tableau 2).

Tableau 2. Tendances évolutives de quelques éléments du compte d'exploitation sous les différents types

5. Déterminants du profit net du producteur
Dans l’optique d’identifier les déterminants du profit net du producteur, un modèle de régression a été estimé. Les résultats de ce modèle sont présentés dans le Tableau 3.

Tableau 3. Déterminants du profit net du producteur

La lecture de ce tableau montre que le modèle de régression est significatif à 1%. Ainsi, 53% des variations du profit annuel des producteurs enquêtés sont expliquées par les variations des variables introduites dans le dit modèle. Les 47% de variations du profit annuel non expliquées par les variations des variables introduites dans le modèle seraient attribuables aux facteurs difficilement mesurables tels que le niveau de fertilité des sols, les conditions climatiques et les divers changements qu’on peut enregistrer d’une saison à l’autre. Les résultats obtenus indiquent que les variables telles que la superficie irriguée, les quantités totales de main-d’œuvre et de capital utilisées, la formation agricole, l’ancienneté de l’activité, l’activité secondaire et son type d’adaptation (stratégies offensive et défensive) sont les déterminants de son niveau de profit annuel réalisé. La superficie irriguée, la stratégie offensive et celle défensif ont des effets positifs et significatifs à 1% sur le profit annuel réalisé par l’irrigant. La quantité totale de main-d’œuvre, l’activité secondaire et l’ancienneté de l’activité ont par contre des effets significatifs positifs pour les deux premiers mais négatifs pour le dernier à 5%. L’âge, la situation matrimoniale, le contact avec l’agent de vulgarisation et l’accès n’ont pas d’effets significatifs sur le profit annuel du producteur.
Le nombre et la diversité des adaptations mises en place par les irrigants indiquent une réelle volonté de minimiser la pénurie des ressources en eau souterraine et les impacts des changements climatiques. Selon la stratégie adoptée par le producteur, des répercutions sont observées sur les éléments de son compte d’exploitation. Les résultats du modèle de régression indiquent que seuls la stratégie offensive et la stratégie adaptative ont des effets significatifs sur le profit annuel du producteur. Ces 2 types d’adaptations apparaissent alors comme les plus économiquement rentables. Dans un contexte où l’irrigant s’adapte aux changements climatiques tout en poursuivant ses objectifs de maximisation de son profit, la stratégie offensive et la stratégie adaptative apparaissent alors comme les stratégies d’adaptation les plus indiquées.
Le profit annuel est aussi significativement influencé par la superficie emblavée, les quantités de main d’ouvre utilisées, le capital utilisé, la formation agricole, l’ancienneté de l’activité et de l’activité secondaire de l’exploitant. L’effet significatif et positif de la superficie est attribuable au fait que les petites superficies appartiennent à des exploitants dont l’objectif principal de production est l’autoconsommation. Ces derniers ne cherchant pas un profit substantiel. Le capital utilisé, bien que positif à des effets négatifs. Ceci va de l’efficacité du producteur dans l’allocation de ces facteurs de production.

6. Conclusion
L’accroissement très prononcé de la variabilité spatiale et temporelle du climat constitue de nos jours des défis majeurs beaucoup plus difficiles à gérer en zone aride et soulève la question d’adaptation. L’objectif assigné à ce papier est d’étudier les stratégies d’adaptations des irrigants à la pénurie des ressources en eau souterraine dans un contexte de changement climatique dans le sud-est Tunisien. Du point de vue méthodologique, l’approche par enquêtes socioéconomiques auprès de 190 exploitations agricoles, et le modèle de la rentabilité économique de COBB-DOUGLAS nous ont permis d’étudier les différentes types de stratégies adoptées par les agriculteurs et d’analyser la rentabilité économique des systèmes de production irrigués en relation avec les adaptations aux changements climatiques. Huit réponses d’adaptation ont été identifiées. Ses mesures comprennent le forage de nouveaux puits et le curage annuel des puits existants, la diversification des sources d’irrigation, l’augmentation de la superficie irriguée, le recours à l’économie de l’eau, le changement des systèmes de cultures, la diversification des cultures et les ajustements du calendrier agricole, la réduction de la superficie irriguée, l’abandon de l’activité irrigué et l’orientation vers l’agriculture pluviale.
En termes de stratégies d’adaptations ces pratiques de gestion sont classées en trois types de stratégies potentiels : une stratégie qualifiée d’adaptative ou de défensive (S1), une stratégie qualifiée d’offensive ou de « chasse » d’eau (S2) et une stratégie qualifiée de contractive (S3). Selon la stratégie adoptée par le producteur, des répercutions sont observées sur les éléments de son compte d’exploitation.
Eu égard à la littérature, ces différentes mesures d’adaptation apparaissent pertinentes. La connaissance de différentes stratégies d’adaptation permet d’identifier des options d’adaptation à la fois réalistes du point de vue de leur mise en œuvre et ambitieuses du point de vue de leurs objectifs et aider à élaborer des priorités pour l’adaptation des ressources en eau pour l’irrigation.
Néanmoins, si certaines sont bien adaptées aux changements décrits (diversification des sources d’irrigation, conservation de l’eau d’irrigation), d’autres sont susceptibles d’aggraver les impacts des changements climatiques et d’engendrer des pressions sur les ressources en eau souterraine (généralisation des stratégies offensives) et met en question la durabilité de ses pratiques sur le plan économique et environnementale et accroître le risque pour le secteur irriguée et de la vulnérabilité en particulier des petites exploitations familiales, qui ont des capacités limités pour s’adapter. La Tunisie doit réagir dès maintenant en fonction de la prévision du climat futur. Des voies alternatives doivent donc être trouvées, à la fois en termes de stratégies, mais aussi pour faire participer les différents acteurs à la conception de ces stratégies afin de réduire les impacts du changement climatique sur le secteur irriguée. Dans ce sens, des mesures d’adaptation doivent être prises dans différentes conditions agro-écologiques et climatiques à travers l’encouragement de la recherche en matière d’évaluation et d’identification des options d’adaptation (paquet technologique agricole adapté aux changements climatiques, diffusion de nouvelles variétés tolérantes et de variétés précoces adaptables aux changements climatiques, etc.) à la fois réalistes du point de vue de leur mise en œuvre et ambitieuses du point de vue de leurs objectifs. Dans le court et le moyen terme, les possibilités d’adaptation du pays doivent passer par une accélération de la mobilisation de nouvelles ressources (construction des barrages et la redistribution de l’eau des barrages vers l’agriculture, recyclage et la récupération des eaux usées pour l’agriculture), recharge de la nappe, collecte des eaux de ruissèlement, intensification de l’irrigation, tarification incitative, amélioration de l’efficacité d’usage de l’eau d’irrigation à travers la génération de l’irrigation goutte à goutte et la réduction des pertes en eau.
D’autres mesures peuvent être liées aux pratiques culturales telles la refonte progressive des calendriers agricoles traditionnels, l’optimisation des dates de semis en fonction des changements du climat, l’utilisation de semences sélectionnées et le choix de variétés à cycle court et résistantes à la sécheresse, et enfin la reconversion et le repositionnement des cultures selon l’évolution du contexte bioclimatique. Ce choix serait cependant cautionné par un accompagnement technique et financier des agriculteurs.
Enfin, des mesures d’accompagnement (formation, encadrement, financement, infrastructure) doivent être prises pour faciliter l’adaptation et aider à élaborer des priorités pour l’adaptation des ressources en eau pour l’irrigation en zone aride ...»-Source: https://newmedit.iamb.it/2019/03/15/eau-et-changement-climatique-quelles-strategies-dadaptation-pour-la-gestion-de-leau-dirrigation-dans-le-sud-est-tunisien/     Cliquez ici


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